أديب وقاص ومترجم أدبي ويعمل في هيئة التدريس -عضو الهيئة الإدارية / مشرف عام على المنتديات والأقسام / نائب رئيس رابطة نور الأدب
L'attente - 1-2-3
L'attente -1</B>
L’attente Jamais, l’on ne pourra t’oublier,ni te chasser des esprits , car …tout simplement , j’aime à la folie ,tes yeux Ô charmante fille des grenadiers ,aux seins d’orange ! Alors.. pourquoi nous faire attendre ?
« Ouyoune » racontent les légendes , était une sirène pourchassée de son royaume « Paradis » , au pays de luth , d’ambre et de poésie . Puis , arrivée sur la côte d’encens , de hinné et de marabout , elle fut accueillie avec révérence par les indigènes , éblouis par le charme que lui procuraient la pure
té de sa peau et , surtout la noirceur mystérieuse de ses grands yeux .
Elle était d’un savoir incomparable , un refuge indécevant .. Aussi , tout individu n’avait-il sur les lèvres que le nom d’ « Ouyoune ». Comment ne pas reconnaître que , grâce à elle, les sources jail lirent et mirent fin à des conflits sanglants une fois que les eaux eurent tari ? et qu’à peine se fut-elle installée que les grenadiers fleurirent et que l’on n’eut plus besoin de sacrifier autant de bœufs sur le seuil d’un « Siyid »(saint) ?
Certes , elle était pour quelques uns un porte malheur et que l’on n’hésita point à orner les portes de formes et d’images susceptibles d’éloigner le mauvais œil , craignant qu’une malédiction divine ne s’abatte sur le Bled .Or , son indifférence et son extrême confiance en elle-même firent reculer tous les médisants . Ainsi , lorsque le jour expirait , elle se trouvait soudain seule et se livrait , alors , à ses cha grins ; retenant sa profonde nostalgie pour ceux qu’elle fut contrainte de quitter et chantonnait : Rapportez , Ô mille et une nuit La nuée embaumée , car l’amour Se désaltère de rosée de l’aube .
Combien de temps passa depuis que les astrologues ont prophétisé de l’extinction d’une étoile ? Cela a suffi pour que l’on se paniquât et que l’on s’attendît à l’approche imminente du jour de la résur- rection..Que de gens s’adonnèrent , alors , aux pratiques ferventes et aux longues prières nocturnes .On nomma l’argent « ordure » de ce monde . Dorénavant , tout a changé...même Ouyoune . Elle n’est plus celle que connurent les anciens : parents et ancêtres .Elle n’a plus cette renommée tant convoitée ,ni ce savoir tant envié . On raconte qu’elle parvient à peine à lire , voire même à déchiffrer un certain nom- bre de « Talacims »qu’elle obtient des «Fkihs » dans les différents marabouts . Menant une vie de plus en plus isolée , elle n’est plus cette créature pleine de vivacité et de gaieté ; cet être charmant qui em - brassait la lune , interrogeait les étoiles , se fondait dans la nuit , se levait avec l’aube et souriait au so- leil … Ceux qui ont le privilège ou , plutôt la chance de la croiser sur le chemin menant au cimetière ,
prétendent que son cœur a perdu tout signe de pitié qui , jadis , caractérisait son âme et dont beaucoup de monde profitait . Comment ? Pourquoi ?..Dieu seul le sait . Mais certains disent , d’autres affirment à tort ou à raison qu’Ouyoune fut victime de la calomnie , de la jalousie , de la haine …de l’amour . Eh oui ! Il est de l’amour qui tue et , « quand le bœuf s’écroule , dit le dicton , les lames se multiplient . »
L’eau pure des sources qui descend sinueusement du haut des montagnes en chantonnant , perd de
fierté et de pureté en allant tout bas embrasser les ondes troublées des fleuves ou les vagues salées
des mers…La colombe qu’une balle atteint en plein ciel , choit , tachée d’un pourpre , en se couvrant de poussière du sol , après avoir survolé ivrement les collines…La feuille qui a vécu longtemps hautai- ne, embrassant son chêne tant aimé, se voit contrainte à s’en séparer en se balançant pour aller se sou- mettre au pied de l’arbre , fanée , sèche , mesquine ...et le cœur ?..oui , le cœur orgueilleux , puis bles- sé et humilié , ne se trouve-t-il pas condamné à vivre aveugle , sourd , exposé aux pires des sentiments si sentiment il y a ?..qu’allez-vous donc oser dire de moi ?..cruelle , sadique? et , ce parce que ça vous paraît étrange qu’une mère reçoive une aussi mauvaise nouvelle avec tant de joie , et que son cœur pal- pite de bonheur en apprenant que son fils unique gît dans un état critique ?.. J’avoue que c’est vrai , je suis heureuse…très heureuse . »
Elle ne se rappelle même pas comment elle a quitté sa demeure et quand elle s’est élancée dans les rues sans s’occuper de sa coiffure , entraînant de lourds sabots à travers le long sentier qui serpente entre les arbres géants jusqu’où se dresse le petit marabout dominant la vallée .
Le lieu régorge de lumière nocturne provenant d’une lune en pleine croissance , masquée par un nuage égaré .Le parcours lui paraît interminable : ça ressemble à un rêve , mais un rêve flou , ambigu , quasi obscur .
A un certain moment , elle n’éprouve aucun sentiment tant elle est abasourdie depuis qu’on l’a avertie de l’incident : le jeune homme fut pris d’une hystérie démoniaque suite à une querelle houleuse avec son épouse . Certes , les disputes et les malentendus étaient devenus fréquents ces derniers temps, mais cela finissait toujours par une réconciliation malgré les longues séparations ; et ce grâce aux bons auspices des proches et des voisins . Cependant , au moment où tout individu ne s’empêchait d’expri – mer sa satisfaction , Ouyoune , elle, se sentait malheureuse , misérable , de plus en plus seule . Rien ne lui était aussi amer que cette page qui se tournait ou que ces querelles qui s’oubliaient vite . Nul ne ren dait son âme aussi gaie que les échos lui rapportant les divergences conjugales des deux jeunes maris et la prospective d’un divorce imminent .
« - Maintenant , c’est fini Il est à moi seule . Je le tiens et je le récupère . »…Jadis , elle avertissait sa bru : « Tu m’as arraché mon gars , mais ce ne sera pas pour longtemps . Un jour ou l’autre il me revien dra et te raiera de sa vie que tu as salie .. et , rira mieux celui qui rira le dernier. »
Elle s’engagea alors dans une lutte acharnée ; consultant les voyants , visitant les marabouts , frap- pant aux portes des sorciers, des charlatans qui , tenant compte de sa soif enragée de vengeance, la cou vraient de talismans et l’incitaient à des pratiques étranges voire indécentes .
En ce moment ,son esprit demeure fort occupé ,aussi ne se rend-elle pas compte de l’air sombre et étrange du guérisseur dont les grandes mains ne cessent de tapoter sur ses épaules presque nues en al- lant caresser craintivement sa poitrine essoufflée . Elle soupire en apprenant qu’elle était la première à arriver auprès de l’infirme . Et... à peine s’est- elle installée au chevet du lit , qu’elle se tourne vers
L’homme en Gandoura blanche qui la contemple en silence avec des yeux enfoncés dans leurs arcades
sourcilières , d’où provient une lueur mystérieuse qui la fait tressaillir :
« - N’est-il pas vrai , Sidi , qu’un possédé ne puisse tolérer une vie conjugale ?
- Oh , réplique l’autre en avalant sa salive avec un léger sourire , ce qui compte maintenant , c’est sa santé . Le traitement sera long , dur et…payant . Mais ne crains rien ..on est là pour servir le Seigneur et prêter main forte à ses humbles créatures . Veillez seulement à ce que rien ne lui manque . Et s’il ar- rive quoi que ce soit tu n’as qu’à m’appeler . Je ne serai pas loin .va te reposer toi aussi car je vois que
tu es trop fatiguée pour veiller toute la nuit . Viens dans ce coin.. »
Il lui montre un matelas usé au pied du lit , puis l’aide à se lever avec ses longs bras qui entourent totalement son corps en s’appuyant nonchalamment sur ses seins dressés , et après l’avoir caressée une nouvelle fois , il se tourne et s’enfonce dans l’ombre .
Le jour se lève , le gravier ne cesse de crisser . Ouyoune observe d’un œil inquiet l’arrivée de cer- taines personnes qui « tentent l’impossible : éviter l’inévitable . »
« - Mon Dieu , que c’est long , la journée !..Et ce va-et-vient !..Et ces visages atroces feignant la sincé- rité et la bonne intention !..Quand est-ce que cette nuit va enfin arriver ? »
Elle s’oppose fermement à ce que sa bru voie son époux ,encore moins s’occuper de lui , et crie à qui veuille l’entendre : « C’est fini . Il est à moi maintenant , et rien ne les unit désormais ! »
La nuit , le calme, le fils et elle..Y a-t-il encore de plus beau ? La voilà au comble de sa joie , s’as- seyant , se levant , mettant quelque chose en ordre sans quitter des yeux le corps étendu :« Il est à moi.. comme il l’était dans le temps… à moi sa mère qui l’aime et qui ne pense point à le tuer . Lui aussi , il m’aime comme jadis , avant qu’on me le happât .. Est-ce la fin de mes souffrances ?..Vais-je enfin sa – vourer quelque bonheur dont j’ai oublié le goût ? »..Sa vie , se plaint-elle , n’est , depuis sa naissance , qu’une série de tragédies et de chagrins .On a violé sa jeunesse avant qu’elle succombât aux désirs aus si bien des proches que des étrangers .Que de temps s’est écoulé depuis lors! Et comme elle est doulou reuse l’expérience dont elle ne garde, à présent , qu’un vague souvenir , une cicatrice au cœur et un fils qu’elle a eu à son insu . Si mon âme gémit , nul ne pourrait l’entendre . Or mon cœur hésite quand il voudrait se plaindre .
أديب وقاص ومترجم أدبي ويعمل في هيئة التدريس -عضو الهيئة الإدارية / مشرف عام على المنتديات والأقسام / نائب رئيس رابطة نور الأدب
رد: Oasis de prose
L'attente - 2</B>
Le crépuscule s’étend à l’horizon , et le sentier sinueux se vide peu à peu , tandis que le petit édifice reprend son calme et sa sérénité . Un étrange climat règne dans cette nuit alourdie par tant de souffrance ,de négligence et de solitude..« Que d’âmes malheureuses se rendent sans la moindre préoc-
cupation ! – murmure-t-elle en mordant ses lèvres au points de les faire saigner -J’ai l’impression que rien n’est banal que cette âme qui , déçue dans ce monde, se voit impatiente de le quitter sans aucun re gret , cherchant refuge ailleurs. »
Elle demeure assise ,contemplant le vide qui s’étale devant ses yeux . Elle perçoit de temps en temps quelque gémissement qui vient déchirer le voile du silence puis, instinctivement ,elle va cares - ser cette figure enfantine tant aimée , quoiqu’elle lui rappelle le moment le plus dur , le masque le plus atroce jamais vu de sa vie .
Ouyoune va céder au sommeil lorsqu’elle entend des pas s’approcher . Son cœur se crispe d’an- goisse car elle sait très bien que nul ne peut venir en ce moment tardif troubler ce calme « si ce n’est ...
Cette maudite de ma bru . »
Elle est sur le point de se lever pour la chasser « comme une sale chienne qu’elle est »,lorsque la silhouette de l’homme à la gandoura blanche l’arrête d’un signe de son doigt en souriant .Cela la rassu re tellement qu’elle consent à quitter la chambre sans hésiter .
Dans cette nuit douce d’automne , tout va se décider… « Pour moi ,c’est une nuit de triomphe . J’ai assez souffert et vécu toutes sortes d’humiliation et de déception ; et maintenant , vient le moment où j’ai enfin le droit de vivre tranquille.. » Elle entrouvre la petite fenêtre donnant sur la vallée éten - due à l’infini.. « Ce sont les cloches de ma revanche qui sonnent , du moins dans mon cœur.. dans mon corps.. dans mon âme… Les autres doivent avaler cette amertume dont je n’oublierai jamais le goût . »
Elle recule quelques pas en brandissant son poing , lorsque l’ombre de l’homme à la gandoura se dresse devant elle, pareil à un sapin . Ses lèvres fines continuent de dessiner le sourire..mais un sourire différent du premier , plein de tendresse et de compassion . Cependant ,ce qui la terrifie en ce moment ce sont ses yeux ..Deux trous noirs, d’où elle ne distingue rien .Elle frémit , mais sourit à son tour…un geste de remerciement .. rien de plus . Et pourtant , cela a un effet de magie sur l’homme qui tressaillit sans qu’elle s’en aperçoive et s’approche davantage au point de la faire sentir son souffle brûlant cou- vrir son visage . Il tend vers elle son long bras et la remet sur des jambes fléchies , puis la traîne vers la porte , laissant le passage libre à une autre silhouette qui file comme une flèche à l’intérieur .
Ouyoune se voit conduite entre les arbustes à travers le sentier sinueux jusqu’à une petite pente offrant une vue panoramique qui lui aurait énormément plu en d’autres circonstances ..
- Sidi.. où allons-nous comme ça.. je veux dire.. mon fils.. il a peut être besoin de moi..
- Ne crains rien.. elle aussi fera de son mieux pour que rien ne lui nécessite..
- Mais…
- Laissons les se rassasier l’un de l’autre.. du moins pour la dernière fois comme tu le souhaites.. hein ?
Tu ne veux pas que le seigneur guérisse ton cher fils ?
- Si.. mais.. je..ne sais quoi dire..
- Ne dis rien -ajoute-t-il avec une voix pareille à un sifflement de boa-à moins.. que.. tu n’aies pas con- fiance en cet humble serviteur.. n’est-ce pas cela.. ma chère… fille ?
Aussitôt ,il l’entoure de son bras osseux . Elle tente de s’en débarrasser timidement de crainte de le fâcher , mais l’autre bras l’immobilise et lui fait perdre son équilibre .. Elle sent le fardeau du corps long et osseux l’écraser et les petits cailloux du sentier lui trouer la peau..
- Non ..Sidi..non..- dit-elle essoufflée en s’agitant- ce n’est pas convenable en présence du seigneur…
- Au contraire.. puisque le seigneur , lui-même le bénit .
Sans savoir comment elle a eu tant de force physique , elle se voit debout , mal coiffée ,tandis que
l’autre dégringole une petite pente . Alors une fureur enragée la saisit , et se met à courir vers l’édifice.
Elle s’arrête au seuil n’osant pas entrer . Des murmures lui parviennent de l’intérieur . Elle se mord les lèvres et regarde derrière elle. L’autre ne tarde pas à la rejoindre . Il passe devant elle sans même regar der de son côté . Cela la réconforte .
Le temps s’écoule et lui paraît une éternité . Elle s’étend , épuisée sur un tapis moisi et part dans un sommeil profond mais troublé ...Elle se voit dans les bras de sa sœur qui mène une vie prospère et de ses proches qui tentent l’impossible pour faire durer cette prospérité . C’est , pour elle un moment de soulagement .. Elle se plaint , sanglote ,soupire , éclate de rire…Et dans son sommeil , le sourire lui
revient enfin et il paraît que quelques instants de détente lui ont rendu son charme auquel , jadis , on faisait éloge et qui ne lui causèrent , hélas , que des ennuis .
Le crépuscule s’étend à l’horizon , et le sentier sinueux se vide peu à peu , tandis que le petit édifice reprend son calme et sa sérénité . Un étrange climat règne dans cette nuit alourdie par tant de souffrance ,de négligence et de solitude..« Que d’âmes malheureuses se rendent sans la moindre préoc-
cupation ! – murmure-t-elle en mordant ses lèvres au points de les faire saigner -J’ai l’impression que rien n’est banal que cette âme qui , déçue dans ce monde, se voit impatiente de le quitter sans aucun re gret , cherchant refuge ailleurs. »
Elle demeure assise ,contemplant le vide qui s’étale devant ses yeux . Elle perçoit de temps en temps quelque gémissement qui vient déchirer le voile du silence puis, instinctivement ,elle va cares - ser cette figure enfantine tant aimée , quoiqu’elle lui rappelle le moment le plus dur , le masque le plus atroce jamais vu de sa vie .
Ouyoune va céder au sommeil lorsqu’elle entend des pas s’approcher . Son cœur se crispe d’an- goisse car elle sait très bien que nul ne peut venir en ce moment tardif troubler ce calme « si ce n’est ...
Cette maudite de ma bru . »
Elle est sur le point de se lever pour la chasser « comme une sale chienne qu’elle est »,lorsque la silhouette de l’homme à la gandoura blanche l’arrête d’un signe de son doigt en souriant .Cela la rassu re tellement qu’elle consent à quitter la chambre sans hésiter .
Dans cette nuit douce d’automne , tout va se décider… « Pour moi ,c’est une nuit de triomphe . J’ai assez souffert et vécu toutes sortes d’humiliation et de déception ; et maintenant , vient le moment où j’ai enfin le droit de vivre tranquille.. » Elle entrouvre la petite fenêtre donnant sur la vallée éten - due à l’infini.. « Ce sont les cloches de ma revanche qui sonnent , du moins dans mon cœur.. dans mon corps.. dans mon âme… Les autres doivent avaler cette amertume dont je n’oublierai jamais le goût . »
Elle recule quelques pas en brandissant son poing , lorsque l’ombre de l’homme à la gandoura se dresse devant elle, pareil à un sapin . Ses lèvres fines continuent de dessiner le sourire..mais un sourire différent du premier , plein de tendresse et de compassion . Cependant ,ce qui la terrifie en ce moment ce sont ses yeux ..Deux trous noirs, d’où elle ne distingue rien .Elle frémit , mais sourit à son tour…un geste de remerciement .. rien de plus . Et pourtant , cela a un effet de magie sur l’homme qui tressaillit sans qu’elle s’en aperçoive et s’approche davantage au point de la faire sentir son souffle brûlant cou- vrir son visage . Il tend vers elle son long bras et la remet sur des jambes fléchies , puis la traîne vers la porte , laissant le passage libre à une autre silhouette qui file comme une flèche à l’intérieur .
Ouyoune se voit conduite entre les arbustes à travers le sentier sinueux jusqu’à une petite pente offrant une vue panoramique qui lui aurait énormément plu en d’autres circonstances ..
- Sidi.. où allons-nous comme ça.. je veux dire.. mon fils.. il a peut être besoin de moi..
- Ne crains rien.. elle aussi fera de son mieux pour que rien ne lui nécessite..
- Mais…
- Laissons les se rassasier l’un de l’autre.. du moins pour la dernière fois comme tu le souhaites.. hein ?
Tu ne veux pas que le seigneur guérisse ton cher fils ?
- Si.. mais.. je..ne sais quoi dire..
- Ne dis rien -ajoute-t-il avec une voix pareille à un sifflement de boa-à moins.. que.. tu n’aies pas con- fiance en cet humble serviteur.. n’est-ce pas cela.. ma chère… fille ?
Aussitôt ,il l’entoure de son bras osseux . Elle tente de s’en débarrasser timidement de crainte de le fâcher , mais l’autre bras l’immobilise et lui fait perdre son équilibre .. Elle sent le fardeau du corps long et osseux l’écraser et les petits cailloux du sentier lui trouer la peau..
- Non ..Sidi..non..- dit-elle essoufflée en s’agitant- ce n’est pas convenable en présence du seigneur…
- Au contraire.. puisque le seigneur , lui-même le bénit .
Sans savoir comment elle a eu tant de force physique , elle se voit debout , mal coiffée ,tandis que
l’autre dégringole une petite pente . Alors une fureur enragée la saisit , et se met à courir vers l’édifice.
Elle s’arrête au seuil n’osant pas entrer . Des murmures lui parviennent de l’intérieur . Elle se mord les lèvres et regarde derrière elle. L’autre ne tarde pas à la rejoindre . Il passe devant elle sans même regar der de son côté . Cela la réconforte .
Le temps s’écoule et lui paraît une éternité . Elle s’étend , épuisée sur un tapis moisi et part dans un sommeil profond mais troublé ...Elle se voit dans les bras de sa sœur qui mène une vie prospère et de ses proches qui tentent l’impossible pour faire durer cette prospérité . C’est , pour elle un moment de soulagement .. Elle se plaint , sanglote ,soupire , éclate de rire…Et dans son sommeil , le sourire lui
revient enfin et il paraît que quelques instants de détente lui ont rendu son charme auquel , jadis , on faisait éloge et qui ne lui causèrent , hélas , que des ennuis .
Le crépuscule s’étend à l’horizon , et le sentier sinueux se vide peu à peu , tandis que le petit édifice reprend son calme et sa sérénité . Un étrange climat règne dans cette nuit alourdie par tant de souffrance ,de négligence et de solitude..« Que d’âmes malheureuses se rendent sans la moindre préoc-
cupation ! – murmure-t-elle en mordant ses lèvres au points de les faire saigner -J’ai l’impression que rien n’est banal que cette âme qui , déçue dans ce monde, se voit impatiente de le quitter sans aucun re gret , cherchant refuge ailleurs. »
Elle demeure assise ,contemplant le vide qui s’étale devant ses yeux . Elle perçoit de temps en temps quelque gémissement qui vient déchirer le voile du silence puis, instinctivement ,elle va cares - ser cette figure enfantine tant aimée , quoiqu’elle lui rappelle le moment le plus dur , le masque le plus atroce jamais vu de sa vie .
Ouyoune va céder au sommeil lorsqu’elle entend des pas s’approcher . Son cœur se crispe d’an- goisse car elle sait très bien que nul ne peut venir en ce moment tardif troubler ce calme « si ce n’est ...
Cette maudite de ma bru . »
Elle est sur le point de se lever pour la chasser « comme une sale chienne qu’elle est »,lorsque la silhouette de l’homme à la gandoura blanche l’arrête d’un signe de son doigt en souriant .Cela la rassu re tellement qu’elle consent à quitter la chambre sans hésiter .
Dans cette nuit douce d’automne , tout va se décider… « Pour moi ,c’est une nuit de triomphe . J’ai assez souffert et vécu toutes sortes d’humiliation et de déception ; et maintenant , vient le moment où j’ai enfin le droit de vivre tranquille.. » Elle entrouvre la petite fenêtre donnant sur la vallée éten - due à l’infini.. « Ce sont les cloches de ma revanche qui sonnent , du moins dans mon cœur.. dans mon corps.. dans mon âme… Les autres doivent avaler cette amertume dont je n’oublierai jamais le goût . »
Elle recule quelques pas en brandissant son poing , lorsque l’ombre de l’homme à la gandoura se dresse devant elle, pareil à un sapin . Ses lèvres fines continuent de dessiner le sourire..mais un sourire différent du premier , plein de tendresse et de compassion . Cependant ,ce qui la terrifie en ce moment ce sont ses yeux ..Deux trous noirs, d’où elle ne distingue rien .Elle frémit , mais sourit à son tour…un geste de remerciement .. rien de plus . Et pourtant , cela a un effet de magie sur l’homme qui tressaillit sans qu’elle s’en aperçoive et s’approche davantage au point de la faire sentir son souffle brûlant cou- vrir son visage . Il tend vers elle son long bras et la remet sur des jambes fléchies , puis la traîne vers la porte , laissant le passage libre à une autre silhouette qui file comme une flèche à l’intérieur .
Ouyoune se voit conduite entre les arbustes à travers le sentier sinueux jusqu’à une petite pente offrant une vue panoramique qui lui aurait énormément plu en d’autres circonstances ..
- Sidi.. où allons-nous comme ça.. je veux dire.. mon fils.. il a peut être besoin de moi..
- Ne crains rien.. elle aussi fera de son mieux pour que rien ne lui nécessite..
- Mais…
- Laissons les se rassasier l’un de l’autre.. du moins pour la dernière fois comme tu le souhaites.. hein ?
Tu ne veux pas que le seigneur guérisse ton cher fils ?
- Si.. mais.. je..ne sais quoi dire..
- Ne dis rien -ajoute-t-il avec une voix pareille à un sifflement de boa-à moins.. que.. tu n’aies pas con- fiance en cet humble serviteur.. n’est-ce pas cela.. ma chère… fille ?
Aussitôt ,il l’entoure de son bras osseux . Elle tente de s’en débarrasser timidement de crainte de le fâcher , mais l’autre bras l’immobilise et lui fait perdre son équilibre .. Elle sent le fardeau du corps long et osseux l’écraser et les petits cailloux du sentier lui trouer la peau..
- Non ..Sidi..non..- dit-elle essoufflée en s’agitant- ce n’est pas convenable en présence du seigneur…
- Au contraire.. puisque le seigneur , lui-même le bénit .
Sans savoir comment elle a eu tant de force physique , elle se voit debout , mal coiffée ,tandis que
l’autre dégringole une petite pente . Alors une fureur enragée la saisit , et se met à courir vers l’édifice.
Elle s’arrête au seuil n’osant pas entrer . Des murmures lui parviennent de l’intérieur . Elle se mord les lèvres et regarde derrière elle. L’autre ne tarde pas à la rejoindre . Il passe devant elle sans même regar der de son côté . Cela la réconforte .
Le temps s’écoule et lui paraît une éternité . Elle s’étend , épuisée sur un tapis moisi et part dans un sommeil profond mais troublé ...Elle se voit dans les bras de sa sœur qui mène une vie prospère et de ses proches qui tentent l’impossible pour faire durer cette prospérité . C’est , pour elle un moment de soulagement .. Elle se plaint , sanglote ,soupire , éclate de rire…Et dans son sommeil , le sourire lui
revient enfin et il paraît que quelques instants de détente lui ont rendu son charme auquel , jadis , on faisait éloge et qui ne lui causèrent , hélas , que des ennuis .
أديب وقاص ومترجم أدبي ويعمل في هيئة التدريس -عضو الهيئة الإدارية / مشرف عام على المنتديات والأقسام / نائب رئيس رابطة نور الأدب
رد: Oasis de prose
L'attente - 3</B>
Agressée par les étrangers , abandonnée par les proches , elle s’est repliée , isolée , trempée dans la honte et la peur . A maintes reprises , elle voulut se redresser , renaître et mener une vie nouvelle di- gne de son passé glorieux… en vain . Et lorsque : « ..étrangère chez moi, seule et impuissante dans un monde agressif , j’ai tenté de créer l’espoir , en m’attachant à une créature que j’ai eue à mon insu ,.. » son rêve s’effondra devant sa grande stupéfaction . Aussi , se livra –t-elle aux larmes en se contentant d’attendre , mais avec une persévérance de plus en plus acharnée .
Des pas sur le seuil la réveillent . Deux paires d’yeux la contemplent en silence.. un silence gla- cial . Elle frotte ses paupières rougies par tant de nuits d’insomnie puis se met debout et regarde tour à tour sa bru et l’homme à la gandoura .Elle distingue un léger sourire sur leurs lèvres mais son esprit na vigue ailleurs .
Après quelques instants de silence et de regards pleins de défi , les deux silhouettes lui laissent le chemin libre en s’engageant dans le sentier . Elle les suit des yeux jusqu’à ce qu’ils disparaissent entre les arbustes , puis , après avoir marmonné quelques injures , elle se tourne vers la porte en soupirant .
« - Mère !... » Elle sursaute et se précipite à l’intérieur en faillant trébucher . Elle tend la main vers une bouteille d’eau sacrée , croyant qu’il a soif , mais l’autre lui fait signe de s’asseoir..
- Mère.. laisse ça… j’ai à te dire .
Il paraît épuisé , voire même à bout de force … Elle veut l’empêcher de parler , mais devant son insistance , elle ne peut qu’y consentir et prêter l’oreille , insouciante de ce qu’il va lui confier . Elle le contemple en admirant son visage enfantin , tandis que ses doigts peignent ses longs cheveux blonds ...
Et à mesure que les mots se poursuivent , entrecoupés , accompagnés d’un halètement lamentable sur des lèvres asséchées, les doigts de la jeune femme se crispent en s’arrêtant de remuer , ses yeux s’écar-
quillent ,sa peau a la chair de poule ,tandis qu’un froid glacial couvre son corps..ou plutôt son cadavre. Les mots de l’infirme se transforment en coups de fouet déchirant son coeur , tordant sa gorge , l’étouf fant à mort…
« - Maintenant , Mère… aide moi…à… m’asseoir ..et donne moi… à boire … »
Elle se lève , recule , s’agrippe à une chaîne pendante du plafond , puis , se dirige lentement vers
la porte ; mais avant de sortir , elle s’arrête et parvient à murmurer :
- Après tout ce qu’on t’a fait ?.. tu veux ...mais oui.. tu m’as tuée.. vous m’avez assassinée , criminels !
- Mère – reprend l’autre en râlant – s’il te plaît… j’étouffe .
Mais la mère est déjà dehors , balbutiant , grognant , gesticulant . Les feuilles sèches et fanées que l’automne parsème partout , et qui semblent se moquer de son revers et de sa honte , crissent sous ses pas . Des pas fléchis , machinaux et lourds .Elle marche sans se retourner , ni répondre aux appels sup- pliants de plus en plus affaiblis . Cependant , elle ne peut s’empêcher de regarder du côté haut du sen- tier .C’est comme un instinct . Bientôt ,des rires lui parviennent , poignardant son cœur ,enfonçant da- vantage ses plaies.
Les yeux secs , les poings crispées , les lèvres pincées , la gorge raidie , Ouyoune poursuit son che min sans se rendre compte qu’elle se dirige vers la falaise . Elle s’arrête . La mer s’étale devant elle , houleuse , menaçante ... « Bâtard ! Ingrat ! J’ai tout sacrifié pour toi . Je n’ai pas voulu t’abandonner au moment où tout autre femme t’aurait jeté sans pitié ni le moindre regret dans les égouts…Ai-je tant souffert pour que tu me dises , avec insolence , que tu aimes encore cette ordure , qu’après tout , c’est ton épouse légale -mon œil !-et que , Dieu pitié , elle est enceinte ?..Puisse le plus haut vous couvre de malédiction…tous…sans exception ! »
Les vagues s’élancent au pied de la falaise , déchaînées , furieuses avec un bourdonnement dont la malheureuse Ouyoune perçoit un appel qui la fait tressaillir . Elle secoue la tête et recule quelques pas en murmurant : « Non.. Ils ne méritent pas ce sacrifice ..Ils ont voulu gâcher ma vie..m’anéantir… Eh bien , ils seront déçus...la pitié ? Non…car , après tout , la vie de cet infirme ne peut engendrer que des bâtards comme lui , des assassins pareils aux autres , et des vermines telles que sa maudite femme .. C’est de mon devoir ,désormais , de délivrer le monde de ces monstres … Je ne regrette rien pour toi , le sais-tu ? Mais je regrette mon cœur fidèle , ému . Oui , mon cœur que tu n’as point connu.
Ceux qui avaient connu Ouyoune , ne l’ont plus revue . Rares ceux qui se souviennent maintenant d’elle , de ses beaux yeux , de sa peau éblouissante et de ses seins irrigant les assoiffés de leur orangea de exquise . On dirait qu’elle leur manque énormément ,et que son existence leur procurait le soulage- ment et l’espoir malgré la vie étrange et humiliée qu’elle menait . Ainsi , sa disparition les plonge tous,
même ceux qui ne l’avaient jamais connue , dans l’inquiétude et l’angoisse…L’on regrette maintenant de l’avoir enviée , tourmentée et abandonnée …
Or , du désespoir naît l’espoir d’une vie meilleure ?... Nombreux sont les repentis qui prophéti - sent de sa réapparition et assurent qu’elle va ressusciter , et que ce sera à l’aube d’une nuit de pleine lune ,sur la côte où l’on doit attendre, à tour de rôle le retour triomphal de « Ouyoune » , la sirène .
Reviens telle que tu es , claire..
Qu’importe , ou averse .
Qu’advient-il donc de ma vie si tu n’y es plus ?
مشرفة / ماستر أدب عربي. أستادة لغة عربية / مهتمة بالنص الأدبي
رد: L'attente - 1-2-3
أعبر عن إعجابي بهذه الثلاثية التي بدأتها قبل قليل، ولي عودة لمتابعتها لاحقا إن شاء الله...
تأخذنا بين النجوم بسحرها فلا أعرف كقارئة تاهت بين جبال هذه الأحرف ؛ أ أنا أمام أسطورة، أم قصة تاريخية أم خاطرة شاعرية استوحت من التاريخ ومن الأسطورة عبقها ...؟!
جميل جدا ما قرأت ومشوق المواصلة ، لكن في حين آخر ..
دمت مبدعا .. أسعدك الرحمن